Jean-Daniel Berclaz installe un petit kiosque en face de la gare de Fribourg. Vétuste, l'édicule renferme les images presque trépassées des bâtiments de l'avenue gare-sud, promis à une prochaine démolition. Mémoire d'un passé architectural dont on ne veut plus, ces clichés nous disent les édifices qui, prochainement, seront remplacés par un complexe administratif et commercial.
Plus de huit cent photographies au total, prises par sept artistes, tirées en cartes postales, montrent -comme autant de regards, de souvenirs proposés au public- l'extérieur et l'intérieur des bâtiments, leurs habitants, leurs ambiances.
Les passants peuvent acheter les cartes postales. Les photos -vendues à un seul exemplaire- n'étant pas remplacées après les achats, le vide apparaît progressivement dans l'installation comme il apparaîtra dans le quartier au moment de la démolition des bâtiments. Ce projet fait l'objet d'une vaste publication dans le numéro de 119 de Pro Fribourg.
Une série complète de photographies, comprenant les 832 clichés, est remise par Jean-Daniel Berclaz aux archives de la Bibliothèque Cantonale et Universitaire de Fribourg.
À TRAVERS LE NOUVEAU FRIBOURG
La Liberté du 27 juillet 1907
...Allons maintenant vers Pérolles et, non sans quelques regrets, constatons en passant que l'"Avenue de la Gare" aurait pu devenir avec un plan d'ensemble une des plus belles entrées de ville de la Suisse. Tout y était : la largeur, la perspective, la ligne harmonieuse. Mais hélas, cette voie unique aura longtemps encore un aspect désordonné, inélégant et, par certains côtés, chétif.
M. Stübben, le célèbre architecte de Cologne, a écrit cette parole profonde : "Chaque rue devrait être traitée comme une individualité", c'est-à-dire recevoir la parure qui convient à sa situation, non seulement topographique mais sociale, dans la cité, à son orientation économique, à l'espace qu'elle occupe, aux relations qu'elle a avec son voisinage. Mais pour arriver à ce résultat il faut prévoir, diriger dans un sens identique ls constructions nouvelles sans tenir compte de ce qui, dans leur entourage, est appelé à disparaître. Il fallait élever, à l'avenue de la Gare, de belles maisons commerciales d'une hauteur égale, d'un aspect uniforme, se tenant les unes aux autres. Je les vois avec de larges et claires arcades qui nous auraient dotés d'un promenoir couvert admirable : il fallait bâtir à cette place une vraie rue compacte aux lignes précises, au style bien défini.
Espérons qu'on pourra, avec le temps, réaliser en partie ce programme, lorsque certaines demeures qui déparent ce quartier en résurrection seront tombées sous la pioche du démolisseur.
Mais que dès maintenant nos édiles ne laissent plus rien au hasard des circonstances.
Georges de Montenach
Conseiller aux Etats
Camérier secret de cape et d'épée
Du pape Léon XIII